Dans la manne inépuisable des survivals,
"A lonely place to die" avait sa chance. Une chance de sortir du lot, de ne pas répéter les mêmes erreurs que l'on voit habituellement dans un sous-genre incroyablement pauvre.
Et le film de Julian Gibley y parvient durant près de trois-quarts d'heure. Il se met en place assez rapidement, plaçant ses personnages au cœur des highlands d’Écosse, introduisant des caractères préconçus mais intéressants, à commencer par Ed le grimpeur râleur et plutôt antipathique qui s'avèrera plein de ressources par la suite, poussé par des situations extrêmes à ne plus se regarder le nombril et à devenir un héros. Il y a aussi Melissa George, excellente comédienne à l'aise dans bien des rôles et qui se surpasse physiquement pour celui-ci.
Le réalisateur filme ses paysages gigantesques et effrayants de solitude avec beaucoup d'ampleur et de professionnalisme, et l'aspect unique du décor naturel offre de belles perspectives à son film. Que ce soient les montagnes ou les forets, il parvient à créer un vrai sentiment ambigu d'enfermement, d'étroitesse alors que tout semble vaste et étendu à perte de vue. Il utilise peut-être un peu trop les fondus pour enchainer ses scènes mais ce procédé n'apparait pour autant pas comme un gimmick et donne une identité à
"A lonely place to die".
Enfin, quand les éléments scénaristiques de suspense se mettent en place, soit la découverte d'une fillette enterrée vivante dans un trou sous la surface du sol avec un unique tuyau rouillé pour lui permettre de respirer, l'intrigue apparait suffisamment retors à ce moment précis pour que l'angoisse s'installe. Une tension palpable, pesante et paradoxalement prenante. On a envie d'en savoir plus, intrigués par cette nouvelle situation que propose le film.
Malheureusement, les problèmes commencent quand Gibley décide d'expliquer le pourquoi du comment. Alors que l'incongruité de la présence de la fillette laissait entrevoir des possibilités d'entrer dans un cadre possiblement surnaturel ou fantastique, alors que l'on spécule sur l'identité de l'enfant et des raisons qui on fait qu'elle soit enfermée dans une minuscule cache souterraine en plein milieu d'une foret écossaise, le réalisateur et son frère scénariste ont choisi un rationalisme de mauvais aloi car particulièrement éculé et surtout assez stupide par rapport au cadre et aux enjeux précédemment développés.
Ainsi se retrouve-t-on bêtement devant une
- Spoiler:
très classique histoire d'enlèvement de la fille d'un milliardaire serbe ou croate et accessoirement ancien criminel de guerre,et de demande de rançon tirée par les cheveux tant les kidnappeurs apparaissent grotesques pour des bandits supposés être passés maitres dans leur "art".
Alors la tension retombe, le suspense s'effondre et l'on suit les pérégrinations des rescapés traqués sans relâche d'un œil distrait et déçu. Mais la catastrophe ne s'arrête pas là ! En abandonnant dans le dernier acte de son film la montagne pour une petite ville où à lieu une sorte de festival culturel avec défilé folklorique nocturne à la clef, Gibley scinde alors son film en deux parties distinctes, la deuxième faisant alors beaucoup de mal à l'intéressante première et s'enfonçant au fil des secondes dans le n'importe-quoi avec fusillades en pleine rue et
"méchants" incroyablement peu discrets qui n'hésitent pas à tirer dans la foule ou à s'introduire chez l'habitant pour provoquer un incendie.
Le final, enfin, achève littéralement le film qui ne semble ne plus trop savoir quoi inventer et fait entrer de nouveaux personnages navrants bourrés de clichés (va-t-on lâcher la bride aux pays de l'Est un de ces jours ? Là où
"la vie n'a que peu de valeur" ?) et se conclue d'une façon abrupt et non-avenue, laissant un peu en plan l'élement probablement le plus important de son intrigue !!!
Même si elle est solidement interprétée (Melissa George en tête, encore une fois) et filmée, cette énième traque en haute-montagne ayant décidé aux deux-tiers de son parcours de prendre un chemin de traverse qui va la ralentir et la ruiner constitue donc un échec certes non définitif en regard des qualités formelles solides qu'elle possède, mais rate la possibilité de sortir des sentiers battus et laisse un peu médusé, un peu hébété par la magistrale façon dont le scénario s'est pris les pieds dans le tapis et s'est cassé la figure, passant à côté de pratiquement tout ce qui aurait pu l'élever au dessus de la masse.
"A lousy place to die".