Les yeux sans visage (1960, Georges Franju)

Les Yeux sans visage, réalisé par Georges Franju, est souvent considéré comme le premier film d'horreur français. Ce qui n'est que moyennement vrai, dans la mesure où, d'une part, il s'agit d'une production franco-italienne, et que d'autre part c'est oublier un peu vite La Charrette fantôme que réalisa Julien Duvivier en 1939. Mais passons ces détails sans grande importance, une chose est certaine : ce film est très marquant, en particulier pour une oeuvre française datant du tout début des années 60...

Pierre Brasseur campe le rôle d'un médecin travaillant, pour faire vite, sur la notion de greffe, et tentant en secret de redonner un visage humain à sa fille, gravement défigurée dans un accident, qu'il a choisi de faire passer pour morte. Mais pour mener à bien cette entreprise, il lui faut naturellement des « donneuses » qui ne sont pas du tout consentantes...

Le film a pris quelques rides, il serait idiot de le nier. Cela se ressent avant tout dans l'utilisation qui est faite de la musique (cependant très intéressante) et dans la gestion des dialogues. Et pourtant, un très fort sentiment de modernité s'en détache. J'insistais sur le fait qu'il s'agissait d'une production franco-italienne pour une raison bien précise : même s'il est tiré d'un roman de Jean Redon, et adapté pour le cinéma par le célèbre duo Boileau-Narcejac, il y a quelque chose de très italien dans ce film, qui à plusieurs moments relève bien plus du giallo que du polar à la française.

A commencer par le fait que, comme dans le giallo, l'accent est beaucoup plus mis sur le caractère même des meurtres et leur motivation psychologique que le sur le côté « policier » de l'histoire, qui passe ici quasiment à la trappe. — De la même manière, la scène centrale du film représente l'opération consistant à enlever la peau du visage d'une jeune femme, en ne laissant que les yeux. Cette scène ne cache rien, ou presque rien, et elle est sensiblement bien faite. Une volonté extrême de montrer l'horreur sans fioritures, plus proche encore une fois du cinéma transalpin que de la tradition française. Une scène nue, filmée de façon très « chirurgicale » (sans mauvais jeu de mot) particulièrement fascinante.

Et si le film ne manque pas de faire des petits égarements dans la poésie ou le jeu des symboles, à travers notamment la thématique du masque, il faut bien reconnaître qu'une réelle violence psychologique imprègne cette réalisation, une froideur sanglante qui, dans ses dernières images, se transforme en une sorte de conte de fée à la fois philosophique et macabre.

Les Yeux sans visage est un film à part, une oeuvre bien plus dense qu'elle n'en a l'air, peut-être, au premier abord. Je n'irai pas jusqu'à hurler au chef-d'oeuvre, mais Franju a de toute évidence réalisé un film bien en avance sur son époque, et bien différente de ce qui pouvait alors se faire. Un rejeton inattendu et maudit du cinéma français « classique », ne cherchant pas cependant à s'intégrer dans la Nouvelle-vague naissante ou dans toute autre théorie du cinéma européen d'après-guerre. Un film OVNI, en somme. A voir.

Tu as une note picrotal?

pour ma part c'est un des meilleurs films français que j'aie vu de ma vie. Moi, je crois que je crierai au chef-d'œuvre^^ 5/5

Je n'aime pas trop noter un film en général, et celui-ci j'aurais bien du mal à l'évaluer de cette manière, c'est pourquoi je préfère éviter.

Les Yeux Sans Visage. Si le seul titre évoque une certaine originalité cela ne s'avère pas tout à fait exact car contrairement à ce qui a été dit plus haut, les influences du film seraient plus à chercher du coté d'Hitchcock (la scène d'ouverture est un sacré clin d'oeil au réalisateur de Psycho) ou encore vers les vieux Frankenstein plutôt que du giallo. Malgré cela Les Yeux Sans Visage possède une forte identité française (la encore, par rapport à ce qui a été mentionné, le film est bien français, tournée à Paris et en région parisienne, seule une actrice est italienne alors que tout le reste de l'équipe est française, nos voisins transalpins n'ayant collaboré au financement qu'en apportant quelques pièces).

L'intrigue est parfaitement bien ficelée pour un film qui se révèle d'une grande cohérence. Il est vrai cependant que quelques ellipses auraient été judicieuses car le métrage compte des longueurs inutiles principalement dans sa première moitié. Les acteurs sont tous intéressants mais il convient de s'arrêter sur Pierre Brasseur qui porte littéralement le film par une excellente interprétation parfois très proche d'un Jean Gabin.

Si la tension dramatique est présente tout du long, quelques traits d'humour très subtils ne laissent pas le spectateur insensible. Les Yeux Sans Visage amène aussi une certaine réflexion notamment par son final peu commun.

Il est finalement triste de constater que c'est en 1960 (plus exactement 1959 M. Picrotal ) que le meilleur film français d'épouvante fut réalisé et qu'en plus d'un demi siècle nous n'avons pas fait mieux. Cela montre également la qualité d'un film qui à l'instar de certains classiques et ce, malgré quelques défauts, ce doit d'être vu par tous les amateurs de cinéma d'horreur tant à son tour il semble avoir été une influence inavouée.

4/5.

J'ai reçu mon Bluray de ce film par la poste hier!! J'ai trop hâte de le regarder... malheureusement, j'ai eu un contre-temps et je devrais le regarder ce soir!! Je ne l'ai jamais vu, mais je n'arrivais pas à le trouver dans ma région!

So... j'vais bien ajouter mon grain d'sel sur ce topic bientôt!

Ça y est: j'ai un nouveau film préféré!

Les yeux sans visage a tout pour charmer: une musique qui nous hante bien après le visionnement du film, des acteurs hors-pairs, une histoire déroutante et des images à couper le souffle (dumoins, sur le bluray...)

Y a pas à dire, l'atmosphère dramatique et inquiétante de ce film ne serait pas la même sans la musique... la petite ritournelle, par exemple, est juste assez dérangeante, étrange et arrive étonnament à coller avec les images et l'intrigue.

Il faut avoir un sacré talent pour arriver à jouer et faire ressentir des émotions au travers d'un masque blanc et aussi simple (quoique plutôt sinistre), mais Édith Scob y arrive sans problème: elle a un regard très expressif! Pierre Brasseur aussi donne une performance stupéfiante: impossible de ne pas sentir la froideur de son sombre personnage... et Alida Valli joue son personnage dévoué et torturé avec brillo!

Que dire de la scène de l'opération?! Vraiment graphique pour l'époque... je me suis surprise à me recroqueviller et à ressentir un certain malaise durant cette dernière! Et, ça, même si je pouvais y voir quelques légers défauts. Une bonne tension... un moment clé qu'on ne peux pas oublier.

Il y avait certes quelques longueurs, mais rien de trop pénible et je ne crois pas que ça nuisait vraiment au film. Les images sont si belles et claires... Un film très poétique et j'y ai même détecté quelques côtés théâtraux dans les mouvements et les dialogues des comédiens.

Un film à voir, sérieusement. Je ne regrette pas l'avoir acheté avant de l'avoir vu!

J'ai déjà envie de le revoir.

Ce serait quoi ta note, Joce ?

Eeeeeuuuhhh...

Ben, j'ai vraiment adoré, mais le film n'est pas parfait... Je sais que j'ai pas mal rien que parlé des points positifs, c'est que les points négatifs me semblaient minimes.

Mais je donnerais sans doute un 8 - 8.5/10! C'est un coup de coeur, disons!

Les films d'horreur ne sont pas légions dans le cinéma français. Quelques courageux se sont toutefois lancé dans l'aventure comme Jean Rollin avec ses fameux films fantastico-érotiques ou encore Roger Vadim avec Et mourir de plaisir. Mais quand on parle de "film d'horreur français", il est impossible de ne pas penser aux Yeux sans visage de Franju. Premier film français du genre, c'est, évidemment, le réalisme de Franju qui rend son film terrifiant. Un chef-d'oeuvre glacial et incontournable qui a presque vider les salles à sa sortie tellement il était intense.