Après une prolifique carrière du côté de Hong Kong, débutée dès 1974 avec The Young Dragons, John Woo mettait en boîte, en 1997, son troisième et probablement meilleur film américain avec Face/Off, après s'être risqué à la tâche avec Hard Target ou le très dispensable Broken Arrow.
Héritant d'un scénario qu'il n'hésita pas à retravailler, John Woo se débarrassa de l'aspect futuriste de celui-ci pour recentrer son intrigue à notre époque et par la même occasion engendrer un film d'action classieux autant qu'une œuvre référentielle pour les amateurs du genre.
Toutefois, avant de sombrer dans l'action pure et de faire montre de sa maestria de par son sens de la mise en scène ou par sa réalisation dynamique, John Woo dévoile des qualités intimistes, comme lors de cette scène d'ouverture sidérante et au grain poussiéreux, alors que ses acteurs principaux, John Travolta et Nicolas Cage, réussissent parfaitement à faire passer les émotions voulues au spectateur, tandis qu'on lit véritablement la détresse d'un père qui vient de perdre son fils ou le désarroi de son ennemi, bien plus occasionné par le fait d'avoir tué un enfant que d'avoir raté sa cible.
Si la chirurgie et les greffes expérimentales débouchant sur le changement d'apparence et l'interversion d'identité sont développées ici comme idées principales, Face/Off se veut bien plus facile d'accès qu'on pourrait le croire de prime abord, d'autant qu'il est surtout question de la lutte entre le bien et le mal, représentée par un policier meurtri et un bandit de la pire espèce.
Très stylisée, la métamorphose des deux antagonistes offre des scènes aussi étonnantes que le propos est dur à avaler, mais l'intrigue, judicieusement construite, permet une totale immersion dans cette histoire aux intérêts multiples.
John Woo se plaît alors à jouer avec ses personnages, à pousser plus loin l'ambiguïté les caractérisant et à confondre subtilement leurs personnalités, même si cela n'engendrera aucune réelle métamorphose morale. Et pour cause, chacun des deux protagonistes finira logiquement par se lasser de son rôle respectif et de cette identité dont ils se retrouvent prisonniers, les amenant à mettre un terme à ce jeu sordide et à régler définitivement leurs comptes.
John Woo, fidèle à lui-même, se délecte alors plus encore avec la partie finale de son film, livrant quelques scènes d'action époustouflantes, comme la course-poursuite en bateau, n'oubliant pas non plus de pousser l'esthétisme à son paroxysme lors du duel entre les deux hommes durant la fameuse fusillade dans la chapelle, même si, tout comme son goût immodéré pour les explosions improbables, on reprochera au cinéaste hongkongais que ses personnages se ratent à bout portant tout en tirant un nombre incroyable de munitions!
Il convient de rendre grâce au duo Travolta/Cage, que j'ai déjà évoqué pour la scène d'ouverture, les deux acteurs participant pleinement à la réussite du projet tant ils sont habités par leur double rôle. Et bien plus encore que son homologue, Cage est magistrale en Castor Troy!
Alors, s'il est vrai qu'on pourra également reprocher à Face/Off d'avoir déterré nombre d'éléments qu'il n'exploitera jamais complètement, tel qu'un traitement plus poussé de la psychologie des deux personnages principaux, le métrage livre cependant la marchandise pour ce qu'il avait vocation d'être, à savoir un très bon film d'action.
4/5.