La sinistre fin d’une aventure
En avril 2009, je décidais de partager avec vous ma passion pour le cinéma d’horreur. Je ne sais pas trop pourquoi je ne l’avais pas fait plus tôt (j’aurais peut-être dû), mais c’est à ce moment précis que ça m’a traversé l’esprit. Je me lançais donc le défi de livrer quelques impressions au sujet de films et j’entrevoyais déjà la possibilité de traiter de l’horreur à travers la culture (plus ou moins) populaire.
Quelques semaines suivant la mise en ligne de ce qui s’appelait alors tout simplement Sinistre, Marc Boiclair, auteur du blogue Montréal Medium Saignant traitant aussi de cinéma d’horreur et apparu à quelques jours d’intervalles du mien, me contactait pour me signifier la chose. Après quelques discussions, nous décidions d’unir nos forces afin de faire rayonner le Sinistre Blogzine. De fil en aiguille, plusieurs collaborateurs se sont greffés à la petit équipe. Certains n’auront été que de passages, d’autres auront été là jusqu’au bout, mais la contribution de tous aura certainement été appréciée.
Malgré la générosité et l’enthousiasme qui habite chacun de mes extraordinaires collaborateurs, je prends la douloureuse décision de mettre fin à l’aventure.
Étant une personne assez modeste et plutôt réservée, je ne suis pas du genre à me péter les bretelles. Vraiment pas en fait. Mais je tiens tout de même à signifier que j’ai toujours cru que Sinistre Magazine offrait du contenu d’une grande qualité. J’en fais d’ailleurs l’une de mes plus grande fièreté. J’ai toujours tenu à ce qu’on traite de la culture de l’horreur et du fantastique avec passion et rigueur et je crois que cela transparaissait en tout temps.
La passion est une chose, mais elle ne peut combler tous les maux et toutes les problématique reliés à la gestion d’un site qui n’existe que par le travail acharné d’une bande de geeks bénévoles (tous aussi charmants que fabuleux, je vous l’assure). C’est hélas la triste réalité.
Après 3 ans et demi d’existence, Sinistre est non seulement le fruit d’une contribution volontaire de tous les membres de l’équipe, mais demeure encore une dépense (hébergeur, nom de domaine, etc.). Il est aussi dommage de constater que certains distributeurs (une majorité en fait) préfèrent toujours envoyer des copies DVD aux journalistes et médias bien connus qui ne daigneront même pas déballer les films dits d’épouvante, plutôt que d’en faire parvenir une copie à un site spécialisé qui se ferait un plaisir d’en discuter. Mais ces studios et distributeurs ont encore le beau jeu, puisque nous payions plus souvent qu’autrement nos billets de cinéma ou nos locations de films pour en traiter sur le site. Le véritable enjeu n’est pas de savoir s’il fallait encore débourser, mais nous aurions apprécié, autant que possible, un accès facile aux nouveautés et rééditions dont nous aurions pu discuter avant leur parution, question de mieux guider le consommateur qui nous faisait confiance dans ses choix. C’est ce que j’ai souvent espéré. Je me demande toujours pourquoi, après quelques tentatives, plusieurs ne ce sont jamais donné la peine de nous répondre, malgré le sérieux plus qu’évident de notre démarche! Il m’arrive moi aussi de ne pas répondre à certaines requêtes. Si je ne le fais pas, c’est que l’approche est soit cavalière ou douteuse. Il m’a toujours semblé que notre approche était au mieux professionnelle. Au pire, nos demandes avaient le mérite d’être courtoises et claires. Avons-nous été ignorés parce que nous ciblions le « trop petit » marché francophone? Était-ce par simple – et trop répandu – je-m’en-foutisme, ou était-ce carrément lié à une forme d’incompétence de leur part? Difficile à expliquer. Notons tout de même que quelques uns auront été plus avenants et nous aurons faits confiance. Nous les en remercions grandement.
Autre élément qui, je crois, aura fini par jouer en notre défaveur est la gratuité. En effet, lorsque nous sommes habitués à obtenir une chose gratuitement, pourquoi faudrait-il soudainement payer? Question légitime, je présume. Mais quand on creuse un peu plus loin sur le sujet, la réponse n’est finalement pas si simple. Je m’explique. Au moment où j’ai lancé le blogue, j’étais seul à fournir du contenu à petite dose et le lectorat commençait à se développer bien discrètement. L’investissement de temps concordait alors avec la part de temps libre que j’étais prêt à consacrer. En peu de temps, l’achalandage a augementé et afin de répondre à la demande tout en nous démarquant, nous voulions offrir du contenu diversifié et de qualité. Des collaborateurs se sont ainsi ajoutés (ce qui demande nécessairement plus de gestion). Sans crier gare, nous sommes devenus auprès de plusieurs une source d’information crédible et appréciée (voir ici et ici, par exemple). La rédaction du Sinistre Magazine voulait en offrir encore davantage, mais cela ne semble plus du tout réaliste dans un contexte de bénévolat. Nous avons tenté quelques démarches pour de la pub, mais encore là, il aurait fallu qu’une personne s’en charge assidûment. Pas évident. Nous avons aussi tenté de sensibiliser les gens à nous soutenir ou à nous exprimer leur satisfaction à l’aide de dons… silence de mort.
Comprenez-moi bien, je ne porte pas la responsabilité ou le blâme sur vous, chers lecteurs, mais ce que je décris réflète simplement la réalité. Il s’agit d’un triste constat. En revanche, je crois qu’il est important de souligner que pour offrir ce que certains étaient habitués d’obtenir comme info sur le site, ça ne se faisait pas tout seul. Tous les membres de l’équipe, sans exception, offraient généreusement de leur temps pour compiler les sorties DVD et CD, fournir une chronique sur les nanar en plus de préparer une bande-annonce montée spécialement pour l’occasion. Il va sans dire que personne n’avait de flingue sur la tempe pour livrer un topo sur un artiste visuel fascinant, ou vous faire un texte en rime sur le slashers, les pires comme les meilleurs! Mais ça demandait tout de même une charge d’efforts pour obtenir un certain niveau de qualité. Et tous ces textes écrits par et pour des passionnés du genre devaient être révisés, mis en page et publiés. La personne qui se livrait à cette tâche, en plus de continuer à faire des critiques, des couvertures d’événements, mettre le calendrier des sorties ciné à jours, tout comme la liste des films répertoriés, en plus d’animer les comptes facebook et twitter, tout en répondant aux demandes des collaborateurs et aux questions d’utilisateurs, c’était moi. Ça pourrait faire un super job à temps plein, mais je le fais aussi dans mes temps libres. Ou plutôt, je commence à sacrifier beaucoup trop de temps de qualité en famille et me prive d’autres activités pour gérer Sinistre Magazine. Je ne vous raconte pas tout cela pour faire pitié (ça non plus, ce n’est pas trop mon truc). C’est surtout pour vous faire comprendre que je n’y arrive plus. La tâche devient trop lourde à porter et ma passion en prend un dur coup au passage.
Ceci étant dit, je ne regrette rien. Je ne veux pas donc pas paraître amer, car ce n’est pas le cas. Je choisis de m’arrêter justement avant de le devenir. Malgré certains irritants, l’ensemble de l’aventure aura été gratifiante, plaisante, amusante. La naissance de Sinistre m’aura permis de partager mon intérêt avec vous tous, mais cela m’aura surtout donné l’occasion de faire de nombreuses belles rencontres qui m’auront même permis de m’exprimer par écrit ailleurs, ou de m’impliquer sur un festival comme SPASM, pour lequel j’avais déjà beaucoup de respect et d’admiration.
Au final, tout ceci aura provoqué de nouvelles amitiés. Marc, Jessy, Izabel, Jason, Jacinte, Kristof, Marybel, Patrick, Élise, Lucie et Antonin, merci! Merci aussi à Jérémie, Ed, Mathieu, François et tous ceux qui nous ont aidé de près ou de loin tout au long de ces 3 années et demi. Un merci particulier à Éric Falardeau pour son apport avec le blogue au sujet de son film à venir,Thanatomorphose, que nous avons très hâte de découvrir.
Voilà, toute bonne chose à une fin, même le Sinistre Magazine.
Salut!
Alexandre Duguay
Fondateur et rédacteur en chef
Prenez note qu’il nous reste quelques textes à publier au cours des prochains jours, mais qu’il n’y aura plus de nouveau contenu par la suite. Le site demeura accessible pour quelques temps.
Amen!
Voici la page du site : http://sinistremag.com/index.php/2012/09/la-sinistre-fin-dune-aventure/
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