Nouveau venu dans le microcosme de l’horreur, Mike Flanagan s’est taillé, en tout juste six ans et avec des projets de différentes natures, une solide réputation au point de devenir un porte-étendard de la nouvelle génération de metteurs en scène du cinéma de genre, même s’il convient de mentionner que la qualité de ses œuvres est aussi versatile que ne le sont les sujets abordés.
Mais loin de tout relativisme de rigueur, Hush -film écrit en collaboration avec l’actrice Kate Siegel, laquelle n’est autre que l’épouse de Flanagan- s’impose comme ce que le cinéaste américain nous aura proposé de meilleur dans sa, certes pour le moment, courte carrière dans l’horreur mais toutefois déjà riche de cinq films.
Dès les premières secondes, Hush témoigne d’une vision aboutie de la part de son auteur, auquel il ne faut guère qu’un plan pour situer l’environnement oppressant du film et instaurer un climat d’isolement pour son personnage principal de Maddie Young. Et si l’idée de départ reste très simple, avec ce huis clos, home invasion, Slasher (puisque le film est tout ça à la fois) mettant aux prises un tueur et sa supposée victime, la rendre intéressante relève de la gageure tant ce postulat fait échec à nombre d’œuvres parfois linéaires ou, au contraire, trop souvent faussement ou inutilement complexes. Ici, la réussite de l’entreprise réside dans le caractère minimaliste du métrage et si le film se veut finalement classique dans son déroulement, d’autant que la conclusion de cette histoire se devine dès le début, Flanagan évite la redondance tout en maintenant l’intérêt durant quatre-vingt minutes, grâce à quelques éléments scénaristiques, une nouvelle fois des plus simples, mais terriblement bien pensés. Ainsi épuré, le scénario du film s’avère d’autant plus efficace que Flanagan oublie, comparativement à ses autres métrages, d’aborder de façon frontale une thématique telle que celle du deuil qui lui tient pourtant fortement à cœur.
Cependant, la qualité première de ce Hush est de réussir immédiatement à immerger le spectateur dans son récit et, chose essentielle, à rendre sa protagoniste attachante. L’écriture inspirée permet ainsi de développer rapidement la personnalité du personnage principal tandis qu’on le suit dans des actions simples du quotidien, la positivité de Kate Siegel doublée à son handicap faisant le reste pour attacher définitivement l’empathie du spectateur.
Expérience sensorielle, Hush est une œuvre qui utilise pleinement la surdité de Maddie Young pour construire son suspense, autant par ce qui est visible à l’écran que ce qui peut être suggéré, et, de ce fait, installe habilement le spectateur dans une position toute aussi inconfortable que celle occupée par sa protagoniste. Et c’est ainsi, pour ce qui restera l’une des meilleures séquences du film, qu’apparaît notre tueur, alors que la soudaineté et la brutalité du premier meurtre impose un sacré malaise en même temps qu’il nous renvoie à des classiques intemporels du cinéma d’horreur que sont le Halloween de John Carpenter et le Maniac de William Lustig. D’ailleurs, il n’est pas bien difficile de deviner quelles furent les influences de Flanagan au moment d’écrire son film tant Hush transpire les deux œuvres citées.
Le traitement du tueur, évolutif comme rarement, est une autre idée qui participe totalement à la réussite du film. D’abord impersonnel, sans nom et masqué qu’il est, il propose par la suite une vraie interaction avec sa victime pour ce qui se veut bien plus qu’un simple jeu du chat et de la souris. John Gallagher réussit même par son excellente interprétation (à l’instar d’une Kate Siegel remarquable dans son rôle au point de laisser croire qu’elle est effectivement sourde) et à quelques lignes de dialogue faussement drôle à rendre son personnage "sympathique".
Hush, malgré ses nombreuses qualités, reste toutefois un film imparfait, souffrant même d’un énorme défaut qui l’empêche de prendre une dimension supplémentaire: la personnalité de son auteur, celle-ci transparaissant dans son œuvre! Mike Flanagan connaît son cinéma d’horreur, c’est certain. De même qui a (trop) conscience de ce qui pourrait lui être reproché et ainsi, le réalisateur fait montre d’une approche bien trop ludique ou plutôt didactique dans sa façon de concevoir et faire du cinéma. De ce fait, Flanagan se sent continuellement obligé de prendre le spectateur par la main, comme s’il était simple d’esprit et incapable de comprendre par lui-même, et de "surexpliquer" les choix qui s’offrent à ses personnages, ainsi que leurs décisions.
Malgré ce dernier point préjudiciable, Flanagan redéfinit, au moins en partie, la notion pourtant très conventionnelle des huis clos, home invasion ou même du slasher avec ce Hush de très bonne facture.
4/5.